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vendredi 16 mars 2012

Des décisions de justice a priori politiques: l'affaire A. Kozlov

Pourquoi la question de l'indépendance de la justice reste-t-elle à ce point irrésoluble en Russie? Pourquoi, à peine un jugement intervient-il sur une affaire sensible, que sans même comprendre/connaître le fond de l'affaire toute une partie de la société parle de règlements de comptes politiques par le biais d'une justice soumise, aux ordres? Tout de suite s'érige le spectre des affaires préfabriquées.

Regardez l'affaire Kozlov. Homme d'affaire. Condamné pour prise de possession frauduleuse des actions de la société "Iskoj" pour une valeur de 30 millions de roubles. Sa femme, Olga Romanova, journaliste/activiste, très médiatisée ces derniers temps, tout d'abord pour son combat visant à la libération de son mari. Ensuite pour ses prises de position - et son don pour l'organisation - lors des meeting protestataires entre les deux élections.

L'enquête a pu démontrer que A. Kozlov, au printemps 2007, par des documents falsifiés, a détourné 33,4% des actions de la société "Iskoj" vers sa propre société. Il a ensuite revendu ces actifs à une autre société, légalisant par ce schéma son opération. Il fut alors, en 2009, condamné tout d'abord à 8 ans de réclusion, puis la peine a été diminuée à 7 ans en appel. A. Kozlov ne reconnaît pas sa responsabilité. Pour lui ce n'est pas une affaire pénale, mais un litige économique qui ressort de la compétence des juridictions économiques d'arbitrage. (voir plus d'informations sur cette affaire ici). La Cour suprême, en septembre 2011, avait cassé le jugement et renvoyé devant la juridiction inférieure. Hier, à Moscou, le jugement a été rendu. Il reprend pratiquement le jugement précédant, mais cette fois-ci A. Kozlov est condamné à 5 ans, il sortira dans 2 ans, ayant déjà éxécuté une partie de la peine.

Et toute une partie de la société crie au scandale (voir ici), l'affaire est fabriquée, tout le système corrompu et ne peut plus fonctionner autrement, quelles que soient les affaires traitées, etc.

Revenons quelque peu sur certains faits. Libéré sous caution entre les deux jugements, A. Kozlov et sa femme ont donné un retentissement médiatique à cette affaire. Sont invités sur les plateaux de télévision. Ce qui est dans leur intérêt et bien compréhensible. Mais se posent alors plusieurs questions:



  • Quand Olga Romanova vitupère en faveur de l'indépendance de la justice, le fait-elle dans l'intérêt du système ou pour la libération de son mari? Autrement dit, le système judiciaire sera-t-il indépendant à ses yeux lorsqu'il aquittera son époux ou lorsqu'il examinera objectivement l'affaire, au risque de le condamner?


  • Quand, lors des grands meeting, dans lesquels elle a pris une part importante pour l'organisation, s'agit-il de défendre les intérêts de la population qui veulent une normalisation du système russe ou de renforcer le bruit autour de l'affaire de son époux?


  • Enfin, une affaire peut-elle se juger dans la rue? Peut-on alors réellement parler de Justice?

Et d'une manière générale, en ce qui concerne l'indépendance de la justice, on peut se demander dans quelle mesure il est intellectuellement honnête d'analyser l'indépendance de la justice au regard d'un jugement concret: si le jugement est rendu conformément à nos voeux, la justice est indépendante, dans le cas contraire elle est truquée. Cette approche fausse le débat. Et ne joue pas en faveur d'une réelle indépendance de la justice, mais renforce le nihilisme juridique.


Mais cela donne un éclairage intéressant de la question: la justice est a priori politique, la justice est a priori dépendante. Et peu importe les jugements rendus. Et peu importe la publication des jugements. Leur motivation. Les caméras vidéos. La justice est a priori injuste.


Parce qu'elle manque de légitimité. Parce qu'elle a été instrumentalisée dans certaines affaires par le pouvoir. Parce qu'elle est instrumentalisée dans d'autres affaires par les parties.


Elle manque de légitimité aussi parce que le contexte politique ne permet pas une rotation du pouvoir. Le roulement des personnalités qui appartiennent aux même milieux de pouvoir ne permet pas un réel pluralisme politique, libérant les juges.


Bref, la question de l'indépendance de la justice est une question systémique qui ne peut se résoudre que dans le cadre d'un libéralisme politique réel. Alors les jugements deviendront légitimes. Et l'Etat et la société en ressortiront renforcés.


jeudi 15 mars 2012

La Douma deviendrait-elle un lieu de discussion?

Сергей Нарышкин объявил дискуссии открытыми
Спикер призвал Госдуму работать по-новому


Hier, 14 mars, le nouveau président de la Douma, chambre basse du Parlement, a présenté sa nouvelle vision de la "politique maison". Dialogue, respect des points de vue et ouverture.

Selon S. Narychkine, les résultats auxquels peut prétendre la 6e Douma "vont dépendre de la capacité des différentes forces politiques au dialogue". En ce sens, "le rôle et l'autorité de la Douma dans le système des organes du pouvoir démocratique doivent augmenter". Pour cela, "la Douma doit être considérée dans la société comme une autorité en matière de dialogue compétent et respecteux sur toutes les questions de bases". Selon ses paroles, "dans un contexte politico-social radicalement différent, la production normative sera un facteur déterminant d'évolution". C'est pourquoi il est important "de défendre son point de vue dans un dialogue au maximum ouvert avec les représentants de différents courants politiques".

Le président de la Douma a porté une attention particulière au principe de séparation des pouvoirs, selon lequel "la Douma doit prendre en toute indépendance les décisions ressortant de sa sphère de compétence". Toutefois, "cela ne doit pas conduire à un conflit entre les branches de pouvoirs". C'est pourquoi, il invite les députés "à se débarrasser des faux stéréotypes hérités des débuts du parlementarisme russe". A la place de cela, S. narychkine préconise d'utiliser avec plus d'efficacité le mécanisme des auditions parlementaires.

Si ce discours a fait l'unanimité, l'opposition reste sur ses gardes. Rappelant que ces préconisations au discours et à l'ouverture doivent surtout être adressées à Edinaya rossiya, qui a toujours l'habitude de décider seule, d'écarter les projets de lois des autres partis sans explication et de ne pas permettre aux autres fractions d'influer sur la prise de décision. D'autres rappelleront aussi que beaucoup de jolis discours ont résonné dans les murs de la Douma sans que rien ne change derrière.

La baisse des résultats électoraux du parti Edinaya rossiya, les mouvements citoyens entre les deux élections ouvrent une nouvelle voie. Celle de la mise en place d'un réel parlementarisme équilibré. Le parti du pouvoir doit comprendre que le temps n'est plus à la gestion autocratique des questions sociales et politiques, mais réellement au dialogue. Ce qui n'implique pas seulement de laisser parler les gens, mais de prendre en compte leur parole.

mercredi 14 mars 2012

L'inhumanité des conditions de détention "provisoire" et violation structurelle des droits: seul recours, la CEDH

ЕСПЧ РЕШИТ, ИМЕЕТ ЛИ ПРАВО ОБВИНЯЕМЫЙ УЧАСТВОВАТЬ В РАССМОТРЕНИИ КАССАЦИИ НА ПРИГОВОР


Une affaire parmis tant d'autres. Une affaire qui pourrait être banale, si elle ne touchait pas l'Humanité des individus. De ces individus qui sont privés de liberté en attendant plusieurs années leur jugement définitif. Et qui sont en même temps privés de leurs droits. Droit à la défense et à un procès équitable. Droit à incompressible à rester des êtres humains et à ne pas être traités comme du bétail, que l'on parque avant l'abattage. Problème structurel du système pénitenciaire russe, qui ne banalise même plus le mauvais traitement, mais l'absence de traitement. Problème du système judiciaire qui voit un coupable avant le prononcé du jugement. Voici un exemple.

V. Borissov, détenu en détention préventive à Ekaterinbourg de 2008 à 2012. Il fait un recours en cassation de son affaire. C'est son droit. Comme il est de son droit d'y participer physiquement avec son avocat. Pourtant, ce droit lui a été refusé. Il fait alors un recours devant la Cour européenne des droit de l'homme. La juridiction de cassation, ayant pris connaissance de ce recours, examinera l'affaire non seulement sans la présence du demandeur, mais également en l'absence de son avocat.

Parallèlement à cela, V. Borissov se bat également pour l'amélioration des conditions de vie dans les cellules de détention provisoire. Dans une cellule d'environ 30 m2, il vit avec 22, voir 45 autres détenus. Il est obligé de partager son lit. Un WC pour tout le monde. Une nourriture insuffisante pour tous. Du linge de toilette qui laisse à désirer ...

Alors que la CEDH a déjà qualifié le problème de la surpopulation carcérale en Russie de structurel, qui appelle une réforme en profondeur, le temps passe, les choses restent en l'état.

Mieux que tout commentaire, regarder la vidéo, les images sont édifiantes. Vidéo tournée dans cette cellule pour le nouvel an 2008.

Navalny convoqué pour extrémisme ... et Rospil aussi

Э вызывает Навального
Алексей Навальный и 5 кооординаторов проекта «Роспил» вызывают в центр Э «давать объяснения»



L'opposant/blogger/avocat Navalny et 5 coordinateurs du projet Rospil (qui lutte contre la corruption et les détournements de fonds) sont convoqués aujourd'hui par le Centre de lutte contre l'extrémisme de la police de la ville de Moscou, pour s'expliquer. Sur conseil de leur avocat, ils ont décidé de ne pas s'y rendre, les motifs de la convocation n'ayant pas été précisés.

Le fondement de cette action pourrait être deux demandes de parlementaires Edinaya Rossiya adressées à la procuratura de contrôler Navalny pour extrémisme. Toutefois, quand l'avocat de Navalny a voulu connaître les raisons précises de cette convocation, il n'a pas obtenu de réponse.

Le député I. Kustinov (ancien directeur du camp de jeunesse "Seliger") avait demandé à la procuratura de vérifier les paroles de Navalny lors du meeting "Pour des élections propres" à Tchystie prudi. En ce qui concerne le député R. Shlegel (ancien commissaire du mouvement de jeunesse "Nachi"), il demandait de contrôler les sources du financement des meeting sur Bolotnaya plochad et sur l'avenue Sakharov, les paroles des orateurs pour extrémisme, les sources de financement de la télévision Dojd (qui se fait remarquer pour sa liberté de ton dans une ambiance plus que conventionnelle) et également de contrôler les sources du financement de plusieurs associations.

Le député Shlegel, contacté par Gazeta.ru, n'était pas joignable pour des commentaires.

En ce qui concerne le député Kustinov, il a précisé avoir demandé une vérification personnelle de Navalny, de ses paroles, ce qui ne touchait en rien le projet Rospil.

Alors que les députés ont constitué leur demande il y a plusieurs semaines de cela, il est intéressant que "l'affaire" ne sorte que maintenant. Maintenant que le mouvement contestataire est retombé, qu'il n'a plus ce caratère populaire. Mais si le pouvoir pense pouvoir alors profiter de l'appaisement pour renforcer une politique répressive envers la société civile au lieu de s'occuper activement d'une réelle modernisation du système politique russe, le pari est risqué. Les gens sont en attente, ils ne sont plus résignés.

mardi 13 mars 2012

Les forces de l'ordre ne sont plus en alerte

Расслабиться!


Le régime d'alerte entré en vigueur le 1er mars pour tout le temps des élections présidentielles a pris fin le 12 mars.

Selon les données officielles pour Moscou, dans la capitale 36 500 personnes ont veillé au bon ordre, dont 16 000 policiers et 14 000 volontaires civils. Des bureaux d'alerte spéciaux ont été mis en place, pour réagir à tout débordement. Pour toute la Russie, environ 440 000 personnes ont veillé au maintien de l'ordre lors des élections présidentielles, dont 380 000 agents des forces de l'odre.

La peur d'une révolution orange était bien présente à l'esprit des décideurs. Les mouvements de rues, pourtant très calmes et plutôt bon enfant inquiétaient. Il est toujours difficile de prévoir comment une foule peut réagir.

Mais la dernière manifestation du 10 mars marque la fin des grands mouvements de masse, au moins pour l'instant. La mobilisation est en baisse, les gens attendent des propositions concrètes qui n'arrivent toujours pas. Les projets de loi réformant le système politique russe sont à l'examen à la Douma. La société civile doit trouver un autre moyen d'action, plus constructif, pour maintenir une pression sur l'Etat, pression constante qui est un mode normal de fonctionnement et permet réellement de conrebalancer les intérêts.


lundi 12 mars 2012

L'association "Pravovaya Initsiativa" rayée du registre des associations après avoir gagné contre la Russie devant la CEDH

«Ъ»: Минюст исключил из реестра НКО правозащитников, отсудивших в ЕСПЧ у России €10 млн




La très importante association étrangère "Pravovaya initsiativa" (Правовая инициатива), qui apporte une aide juridique aux citoyens dans leurs recours auprès de la CEDH et a fait condamner la Russie à hauteur de 10 millions d'euros sur le recours de citoyens tchétchènes, a été retirée du registre des assocations par le Ministère de la Justice, qui en a la charge.


Comme le reconnaît le directeur exécutif de l'association, celle-ci est en partie fautive. Elle n'a pas présenté dans les temps son compte-rendu d'activité et de financement. Suite à quoi, le Ministère de la Justice les a informé de leur retrait du registre des associations.


Mais alors qu'il s'agit d'une mesure extrême, ils n'en ont pas été avertis en avance, afin de régulariser leur situation.


Après cela, trois fois l'association a tenté de rétablir son enregistrement dans le registre, mais en vain. La première fois, les fonctionnaires se sont appuyés sur une imprécision dans la formulation de l'adresse juridique de l'association. La deuxième fois, ils ont mis en doute la véracité des données personnelles (issues des passeports) des demandeurs. Enfin, le troisième rejet était fondé sur l'imprécision des buts de l'association.


L'association porte l'affaire en justice.

La CEDH ne revient pas sur sa décision de l'affaire Yukos

«Московские новости»: ЕСПЧ не станет пересматривать решение по делу ЮКОСа


La Cour européenne des droits de l'homme a refusé de revenir sur son jugement dans l'affaire Yukos contre Russie, les représentants de la compagnie n'ont pas réussi à démontrer les aspects politiques de la première affaire.

Les juges ont reconnu la violation des droits de Yukos en ce qui concerne le droit à un procès équitable et, sur certains aspects, une violation du droit de propriété. Mais selon le représentant de la compagnie, le problème central n'est pas dans les aspects processuels, mais dans la motivation politique.

L'avocat anglais, représentant la Russie, parlait lui d'importants détournements de fonds réalisés par les dirigeants de la compagnie Yukos.

Mais la Cour n'a pas vu de fondement pour revenir sur sa décision, dans le sens où il n'y a pas suffisamment d'éléments laissant entendre que les autorités aient utilisé la justice dans le but de prendre possession des actifs de la société.

La décision n'étant plus suceptible d'appel, elle est maintenant définitive.